31 juillet 2011

18ème anniversaire du décès du roi Baudouin

(© Palais royal - Collection personnelle)

30 juillet 2011

« Royale Europe » de Peter Conradi



Peter Conradi est un journaliste du Sunday Times, connu pour ses chroniques sur la monarchie britannique. Il est le co-auteur de « Le Discours d’un roi », livre qui a été adapté récemment en film et qui a connu un grand succès. Il a par ailleurs été correspondant, notamment à Bruxelles. 

L’auteur s’est attelé également à l’écriture d’une enquête parue chez Plon, à la veille des deux grands mariages de l’année 2011, sur les monarchies européennes contemporaines, c’est-à-dire le Royaume-Uni, Monaco, l’Espagne, la Belgique, la Suède, les Pays-Bas, la Norvège, le Danemark, le Luxembourg et le Liechtenstein.






  Les chapitres :

  1. « Who’s who »
  2. Aller et venir
  3. Les ombres du passé
  4. Apparat et pouvoir politique
  5. Une journée de travail ordinaire
  6. L’apparat, les fêtes et les factures à payer
  7. Les rois qui ne sont pas sages
  8. Des maîtresses, des bâtards et des maris complaisants
  9. Trouver une nouvelle princesse Grace
  10. Se marier dans la famille
  11. Du pont de l’Alma aux cours royales de justice
  12. Apprendre à devenir monarque
  13. La grenouille qui s’est transformée en prince et autres contes de fées
  14. Le jeu de l’attente
  15. Conjoints et suppléants
  16. William et Kate
  17. Et la lumière fut
  18. Vive la République
  19. Un rège sans fin

Ce livre, épais, est comme son sous-titre l’indique une « enquête inédite » et très intéressante du point de vue d’une étude comparée des différentes monarchies européennes. L’ouvrage est riche en anecdotes historiques, qui étaient souvent, pour ma part, inconnues. Au long de la lecture, on sent que l’auteur s’est merveilleusement bien informé. Il cite par ailleurs des sites francophones spécialisés comme Noblesse & Royautés de Régine Salens et le blog sur la famille royale belge de notre ami le Petit Belge, ce qui prouve la profondeur de son investigation.

La seule réserve que j’émets est que l’auteur parle très peu de la famille grand-ducale de Luxembourg et de la famille princière de Liechtenstein.

29 juillet 2011

Mariage : Marie-José de Belgique et Umberto d'Italie

Malgré l’inexistence de cette formule à cette époque, le grand mariage qui se déroula en 1930, liant les maisons royales belge et italienne, peut être considéré comme l’un des « mariage du siècle ».

La princesse Marie-José de Belgique, née en 1906, est l’unique fille du roi Albert Ier et de la reine Elisabeth, née duchesse en Bavière. A sa naissance, ses parents sont jusqu'en 1909 les héritiers du roi Léopold II, son grand-oncle. Très vite, ses parents vont caresser l’idée d’un mariage de leur fille avec l’héritier au trône italien, le prince Umberto de Savoie, prince de Piémont, duc de Savoie et prince de Carignan. Né en 1904, il est le fils unique du roi Victor-Emmanuel III d’Italie et de la reine Helena, née princesse de Monténégro. Il est à l’époque également question d’un possible mariage entre le prince héritier Léopold, duc de Brabant, avec l’une des sœurs du prince de Piémont, la princesse Mafalda de Savoie (semble-t-il que ce projet ne convenait guère au prince).

Durant la Première Guerre Mondiale, alors que ses deux frères, Léopold et Charles, continuent de poursuivre leur éducation en Grande-Bretagne, Marie-José est envoyée en mars 1917 au Santissima Annunziata du Poggio Imperiale de Florence, école élitiste pour jeunes filles. Elle y étudiera jusqu’en juin 1919, lui permettant – si le projet se concrétise un jour – de se familiariser à l’italien et à ce pays du sud. Elle y recevra la visite fréquente de la reine Helena, et les futurs époux se rencontreront pour la première fois le 7 février 1918 au château de Lispida, près de Padoue.  

La princesse poursuivra ensuite ses études en Belgique, mes les tractations matrimoniales ne cessent pas pour autant et s’amplifient dès 1924. Ainsi, par l’entremise de la reine Elisabeth, Marie-Josée, accompagnée de son frère Léopold, sera l’invitée de la famille royale en la résidence de San Rossore. Cependant, le prince Umberto y est absent… Il faut dire qu’à l’époque, le prince apparait comme l’un des plus beau parti du gotha et connait de nombreuses aventures.

Finalement, le projet est mené à bien et les deux familles sont heureuses de voir aboutir cette union. La princesse est charmée par ce prince, si élégant dans son uniforme. Le prince, lui, semblait davantage se résoudre au projet de ses parents et à sa condition de prince héritier qui, à l’époque, le contraignait de faire une belle union avec une princesse d’Europe. 
Fiançailles de la princesse Marie-José et du prince Umberto
au château de Losange

Les fiançailles ont lieu le 7 septembre 1929 au château de Losange. Ce château est alors la propriété de la comtesse Frédéric van den Steen de Jehay, née baronne Henriette Snoy, dame d’honneur de la reine Elisabeth. Ce n’est que bien plus tard que cette demeure des Ardennes verra la naissance d’une demoiselle d’Udekem d’Acoz qui sera appelée à épouser le prince héritier Philippe de Belgique en 1999, mais ça, c’est une autre histoire !

Cette rencontre à Losange est l’occasion pour le prince Umberto de demander la main de la princesse. La demande du prince sera ponctuée par cette cinglante déclaration : « Tu vois, dans notre position, nous sommes comme dans une prison. Nous ne sommes pas libres de faire ce que nous voulons, de décider de notre avenir comme les autres jeunes. »

Les fiançailles sont officiellement annoncées aux Belges le 24 octobre 1929. Le lendemain, le prince sera la cible d’un attentat lors d’une cérémonie d’hommage au Soldat Inconnu à Bruxelles. Le prince échappe au tir de l’antifasciste italien De Rosa. A cette date, Mussolini est déjà président du Conseil depuis quelques années et certains reprochent à la famille royale son mutisme voire son approbation face à ce régime. Il semblerait que le prince ne nourrissait pas les mêmes idées que le dictateur, mais il ne réprouva jamais autant ouvertement ce régime que son épouse, détestée du Duce qu’il désignait cependant comme « le seul homme de la famille ». 

Diadème acheté dans les années 1920 à Vevey (Suisse) par les parents (ou par son frère, le prince Charles) de la princesse Marie-José dans une vente privée qui dispersait les bijoux du duc Georges de Leuchtenberg (1852-1912), prince Romanovsky.
Le montage moderne a été effectué par le joailler August Holmström de chez Fabergé. Il est composé de 214 brillants, totalisant 85 carats, et de 400 diamants rose. Au centre, le diamant goutte est de 8,30 carats, et de part et d'autre celui-ci se trouvent trois briolettes en forme de poire. Peut-être ces dernières sont issues de la collection de Catherine de Russie. Ces pierres auraient été ensuite offertes à l'impératrice Joséphine par le tsar Alexandre Ier, passant ensuite à son fils, le duc Eugène de Leuchtenberg (1781-1824) et puis au fils de ce-dernier : le duc Maximilien de Leuchtenberg (1817-1852).
Il a été vendu en 2007 par la princesse Marie-Gabrielle de Savoie chez Cristie's pour 1.500.000€
© Ancienne Collection Seiler

Ce mariage fut l’occasion d’une déferlante de cadeau de toutes parts. Les parents de la mariée lui offrirent tout d’abord un diadème, splendide, de style russe, qu’elle ne porta jamais cependant. L’ouverture d’une souscription nationale a permis d’offrir à la future mariée son voile de dentelle en point de Bruxelles, ainsi qu’une bague en platine rehaussée d’un étincelant diamant blanc, bleu et rose. D’autres cadeaux arrivèrent également au Palais comme un collier de style Art Déco, offert par la Ville de Paris qui portait en haute estime son père, le Roi-Chevalier ou encore une montre-bracelet incrustée de brillants.

Collier de style Art Déco offert par la Ville de Paris,
dessiné par Georges Fouquet.
Le pendentif est composé d'un saphir cabochon
au centre, zébré de diamants
© Fonds photographique Fouquet/Musée des Arts décoratifs, Paris

Montre-bracelet en brillants de Jenatzy et Severin
© Collection Christophe Vachaudez

Diamant blanc, bleu, rose, de taille émeraude, dans son écrin,
monté sur une bague de platin, offert par souscription nationale belge
© Collection Christophe Vachaudez

Le mariage célébré en Italie devait offrir plusieurs jours de réjouissances. La maison royale italienne mit son luxueux train royal à disposition de la famille royale belge pour faire le voyage de Bruxelles jusqu’à Rome. A Civitavecchia, dans le Latium, le prince Tommaso de Savoie, duc de Gênes, cousin du roi, vint à la rencontre du convoi. Le prince Umberto monta à bord du train lors d’un arrêt dans le Transtevere, l’un des faubourgs de Rome.

Arrivé à dix heures du matin en la gare centrale où y attendaient les souverains italiens et les princes de Savoie, le roi des Belges passa en revue la compagnie d’honneur. Ensuite, les invités furent conduits jusqu’au palais du Quirinal en landau : l’un destiné à Marie-Josée, le prince Umberto, la duchesse de Brabant, épouse du prince Léopold depuis 1926 et le prince Charles, comte de Flandre ; un pour les reines Elisabeth de Belgique et Helena d’Italie, accompagnées du prince Léopold ; et un autre pour les rois des Belges et d’Italie. Le cortège circula dans les rues pavoisées de Rome, accompagné des vivats de la foule, sans oublier le déploiement de carabiniers et de cuirassiers. Un arrêt, à mi-parcours, sur la place Esedra, permit au gouverneur de Rome de souhaiter la bienvenue aux princes belges. Après, les invités purent regagner le Quirinal, où parmi les invités les attendaient les princesses de Savoie Jeanne et Marie-Françoise, le tsar Boris III de Bulgarie, Mussolini ou encore Pétain (pour la petite histoire, c’est après le mariage de Marie-Josée et d’Umberto que Boris III demanda au roi d’Italie la main de sa fille, la princesse Jeanne). Ensuite, les fiancés apparurent alors au balcon, en compagnie de leurs parents respectifs.

Au balcon (de gauche à droite) : la reine Helena d'Italie, le roi Albert Ier de Belgique,
la princesse Marie-José de Belgique, le prince Umberto de Savoie, la reine Elisabeth
de Belgique et le roi Victor-Emmanuel III d'Italie 
Une grande chasse à courre fut également organisé dans la campagne romaine.
On peut y reconnaître (devant la porte) le prince Gustave Adolphe de Suède,
le roi Victor-Emmanuel III, le prince Cyrille de Bulgarie, le duc d'York
(accoudé à la fenêtre) et le prince Umberto (adossé au bâtiment, à l'extrême-droite)

La famille royale belge eut l’honneur d’être reçue par le pape au Vatican et assista à une cérémonie religieuse en la chapelle du Saint-Sacrement. Le roi et les princes étaient flanqués en uniforme tandis que les dames portaient la toilette noire, rehaussée de pierreries. Le roi Albert Ier et les princes Léopold et Charles assistèrent également à une cérémonie en hommage au Soldat Inconnu italien.

La famille royale dans une des loges du Vatican, après l'audience papale, entourée de hauts dignitaires : (de gauche à droite) : le prince Léopold, la princesse Marie-José, le roi Albert, la reine Elisabeth, le prince Charles et la princesse Astrid.
Marie-José porte un diadème de perles qu'elle avait arboré pour son premier bal de la Cour. Il montre une succession de pinacles en perles reposant sur un bandeau en or ciselé nanti également d'une bordure de perles. Il avait appartenu à Stéphanie de Beauharnais (1789-1860), nièce de l'impératrice Joséphine : il s'agissait d'un cadeau de Napoléon au grand-duc héritier Charles de Bade (futur Charles II) suite à son mariage avec Stéphanie, qui avait été adoptée par l'empereur. Le diadème échut à sa petite-fille la princesse Caroline de Vasa (1833-1907), fille Louise de Bade et du prince suédois Gustave Vasa, et qui épousa le roi Albert Ier de Saxe. Décédée sans postérité, elle légua ce diadème à sa cousine et confidente, la princesse Marie de Honhenzollern-Sigmaringen (1845-1912), fille de la princesse Joséphine de Bade (sœur de Louise de Bade) et du prince Charles-Antoine de Hohenzollern-Sigmaringen. Marie épousa le prince Philippe de Belgique, comte de Flandre et, en tant que grand-mère paternelle de Marie-José, c'est comme ça qu'il tomba dans son écrin. La princesse Marie-Gabrielle de Savoie l'a vendu en 2007 chez Christie's (60.000 €)
Concernant le diadème d'Elisabeth, il s'agit du fameux diadème Cartier acheté en 1912, composé de brillants montés sur platine. Il a été dessiné par Henri Chenaud, représentant une succession de postes et de feuilles d'acanthe. Le diamant central pèse 5,84 carats. A sa mort en 1965, c'est sa belle-fille, la princesse Lilian de Rethy (1916-2002), seconde épouse de Léopold III qui en jouira. Elle s'en séparera en 1987 dans une vente de Christie's. La maison Cartier l'a alors racheté.
La princesse Astrid, duchesse de Brabant porte un diadème qui est un cadeau de la ville de Stockholm. Il est composé de plusieurs centaines de diamants montés sur latine, sommés d'une importante perle baroque de 60 grains montée en fleuron et entourée de diamants. Il a été dessiné par le joailler de la cour suédoise Andersson et fut remis à la princesse par le gouverneur de la ville au nom des habitants. Il pouvait être transformé en collier ou en bracelet. La princesse Lilian de Rethy porta parfois la perle sous forme de broche.

Les deux familles royales et les prestigieux invités se retrouvèrent dans une estrade afin d’assister à un grand cortège populaire où y étaient représenté toutes les provinces italiennes. On pouvait de cette manière apprécier les diverses tenues traditionnelles de provinces telles que la Sicile, Naples, la Calabre ou des colonies comme la Libye, l’Érythrée, le Dodécanèse et la Somalie.

Le cortège populaire, avec au fond à gauche, la tribune royale
Les fiancés lors du défilé du cortège
    
Le jour du mariage arriva enfin le 8 janvier 1930. La cérémonie se déroula à dix heures en la chapelle Pauline du palais du Quirinal, célébrée par le cardinal Maffi, archevêque de Pise. La mariée portait une robe à traîne, œuvre de son époux, habile en dessin, en velours blanc garni d’hermine dont la confection avait été confiée à la maison Ventura. La robe était agrémentée d’un manteau de Cour en velours brodé d’hermine et doublé de lamé argent de six mètres de long. Sans oublier le voile de dentelle en point de Bruxelles offert par souscription nationale du peuple belge. Pour parachever le tout, Marie-José brillait davantage grâce au grand diadème de perles et de diamants de la reine Marguerite d’Italie, dont Umberto lui avait fait cadeau la veille.

La cérémonie religieuse dans la chapelle Pauline

Les ducs de Brabant dans leurs appartements privés, juste avant le mariage (© Le Soir Illustré)
La princesse porte le diadème des neuf provinces (déjà abordé, ici) ainsi qu'une robe enroulée entièrement enroulée en brocard Mahrad'or à longue traîne surmontée d'un somptueux manteau de Cour en velours rouge rubis garni de dentelle et de broderie d'or ainsi qu'un voile en dentelle.

Les mariés (© Le Soir Illustré)
Le diadème de diamants et de perles de la reine Marguerite connait diverses variations. Il appartient toujours à la Maison de Savoie aujourd'hui, en étant la propriété du prince Victor-Emmanuel de Savoie, fils de Marie-José, dont l'épouse, Marina, en fait parfois usage (voir : sur N&R)

Après la cérémonie, le couple se rendit directement auprès du pape, au Vatican, où la mariée put apparaître avec sa robe d’une immaculée blancheur, apanage des princesses de Savoie de pouvoir apparaître de blanc vêtue devant Sa Sainteté (cependant, je ne sais pas pourquoi la reine Elisabeth, en tant que souveraine régnante et ayant le prédicat d’Altesse Royale, était en noir lors de la réception de la famille royale…).

Accueil des mariés par le gouverneur du Vatican (à gauche de Marie-José)
avant l'audience papale, dans un salon précédant celui du Petit Trône

Le couple, après l'audience papale, en la Basilique Saint-Pierre
où ils observent un rite très ancien 
Le lendemain de la célébration nuptiale, une impressionnante revue militaire s’est tenue dans l’ancien hippodrome des Parioli où le prince Umberto, fraîchement nommé colonel du 92ème régiment, défila devant les prestigieux invités. Avant le départ de la famille royale belge, le roi Albert assista à une démonstration d’avions programmée en son honneur, à l’aérodrome de Ciampino, en compagnie des souverains italien et bulgare et des princes étrangers.

Le prince Umberto lors du défilé des troupes

Les célébrations de l’union prirent fin avec une revue des troupes de la garnison de Rome effectuée par le roi Victor-Emmanuel III et le prince de Piémont, en présence de la fraîche Maria del Belgio, principessa di Piemonte, comme elle le signera – pour la première fois quelques jours plus tard dans un livre d’or lors d’une visite, avec son époux, du Panthéon à Rome.

Nouvelle signature de la princesse Marie-Josée

Timbres commémorant le mariage princier, portants les armes royales de Belgique (à gauche) et les armes de la Maison de Savoie (à droite). Le premier timbre (20 cent.) a été imprimé sous l'impulsion du gouverneur de Rome. Les deux autres timbres (50c.+10c. et 1,25lire+25c), comportant un surtaxe, ont été édités au profit de la Croix-Rouge italienne. (© Collection personnelle)

L’union fut couronnée par la naissance de quatre enfants : la princesse Maria Pia en 1934 ; le prince Victor-Emmanuel, prince de Naples, en 1937 ; la princesse Marie-Gabrielle en 1940 et la princesse Marie-Beatrice en 1943.

Le couple deviendra en 1946 les éphémères souverains du royaume d’Italie, le temps, presque, d’un mois de mai. La république fut en effet proclamée par référendum dès le 2 juin 1946 suite à l’attitude jugée trop complaisante du roi Victor-Emmanuel III face à Mussolini, ce qui l’obligea d’ailleurs à abdiquer mais ce qui ne permit pas de sauver la monarchie.

Leurs devoirs accomplis, destinés à l’exil, le couple se sépara dans cette épreuve. De toute façon les réels liens d’amour leur faisaient cruellement défaut. Le roi déchut pris la direction du Portugal, en compagnie de sa fille, la princesse Marie-Beatrice. Quant à la reine et ses autres enfants, ils s’installèrent en Suisse.

Le couple a toujours gardé une profonde affection envers l’un l’autre, et se retrouvait avec plaisir lors des réunions du gotha auxquelles ils étaient conviés. Umberto II est décédé en 1983 à Genève d'un cancer des os. Cette année là fut pour Marie-José une année ponctuée de moments difficiles : outre la mort de son mari, elle perdit aussi ses deux frères, Léopold III et Charles, le régent oublié. La  « Reine de Mai » s’éteignit en 2001 à Thonex, en Suisse, à l’âge de 94 ans. Les deux époux sont inhumés, côté à côté, dans l’abbaye de Hautecombe en Savoie.

26 juillet 2011

Naissance du prince Guillaume de Luxembourg

Le prince Guillaume, Jean, Joseph, Marie de Luxembourg est né le 11 novembre 1981 à la maternité Grande Duchesse Charlotte à Luxembourg. Il est le premier enfant du couple héritier Henri et Maria Teresa. Il est également le premier petit-enfant du grand-duc Jean et de la grande-duchesse Joséphine-Charlotte. En outre il est le quatrième arrière-petit-enfant de la grande-duchesse Charlotte, après le prince Philippe de Ligne né en 1977, la princesse Mélanie de Ligne née en 1979 et la princesse Antoinette de Bourbon-Parme née en juin 1981. Son parrain est son oncle le prince Guillaume de Luxembourg et sa marraine est sa tante la princesse Marie-Astrid de Luxembourg, archiduchesse d'Autriche par mariage. Le Prince a été baptisé le 2 décembre 1982 au Palais grand-ducal.

© M. Tockert/Editions A. Rottigni
© Collection personnelle Valentin Dupont

Le prince Guillaume entouré de son père le grand-duc héritier Henri
 et de son arrière-grand-mère la grande-duchesse Charlotte
© Collection personnelle Valentin Dupont

25 juillet 2011

Visite japonaise au Luxembourg

Les 30 et 31 mai 1997, l'empereur Akihito du Japon et son épouse, l'impératrice Michiko étaient en visite officielle privée au grand-duché.

Le grand-duc Jean et la grande-duchesse Joséphine-Charlotte s'étaient alors déjà rendu au Japon, suite à une visite d’État en Chine en 1979, à l'époque où le père de l'empereur actuel, Hirohito, régnait encore (dans la foulée, ils passèrent également par la Thaïlande et la Corée). Et c'est au Japon que le couple réserva sa dernière visite d’État du 5 au 12 avril 1999. 

L'impératrice Michiko, la grande-duchesse Joséphine-Charlotte, le grand-duc Jean et l'empereur Akihito (© Collection personnelle)

21 juillet 2011

La prestation de serment de Léopold Ier

Entrée solennelle de Léopold de Saxe-Cobourg-Gotha dans Bruxelles, passant ici par la porte de Laeken (© Musée Royal de l'Armée)

La journée du 21 juillet 1831 débuta par la remise des clefs de la ville de Bruxelles à Leopold par le bourgmestre Roupon, à la porte d’Anvers.

Ensuite le convoi se dirigea vers la Place Royale où une estrade avait été construite au bas du perron de l’église Saint-Jacques-sur-Coundenberg. Tous les hauts dignitaires du pays étaient présents, ainsi qu’une foule qui, dit-on, remplissait le Parc et la place des Palais, poussant des vivats enthousiastes.

A 13h15, la cérémonie débuta par la remise solennelle des pouvoirs du régent Surlet de Chockier à Etienne de Gerlache, président de la Chambre des Représentants. Ensuite, quatre secrétaires du Congrès s’avancèrent. Le vicomte Charles Vilain XIII s’adonna à une lecture de la Constitution, suivie par une lecture du serment faite par Jean-Baptiste Nothomb. Enfin, Charles Liedts, secrétaire du Congrès National, présenta à celui qui allait devenir roi la plume avec laquelle il signa le procès verbal de la cérémonie qu'il remit ensuite à Charles de Brouckère.

Prestation de serment du roi Léopold Ier (© Musée Royal de l'Armée)


Léopold put alors prononcer le serment : « Je jure d’observer la Constitution et les lois du peuple belge, de maintenir l’indépendance nationale et l’intégrité du territoire ». Ce serment n’a depuis lors pas changé pour les différents rois des Belges qui l’ont prononcé.

Le désormais roi Léopold s’adonna dès lors à ce discours : « La promptitude avec laquelle je me suis rendu sur le sol belge a dû vous convaincre que, fidèle à ma parole, je n’ai attendu pour venir au milieu de vous que de voir écarter par vous-mêmes les obstacles qui s’opposaient à mon avènement au trône. Les considérations diverses exposées dans l’importante discussion qui a amené ce résultat feront l’objet de ma plus vive sollicitude. J’ai reçu, dès mon entrée sur le sol belge, les témoignages d’une touchante bienveillance, j’en suis encore aussi ému que reconnaissant. A l’aspect de ces populations ratifiant par leurs acclamations l’acte de la Représentation nationale, j’ai pu me convaincre que j’étais appelé par le vœu du pays, et j’ai compris tout ce qu’un pareil accueil m’impose de devoirs. Belge par votre adoption, je me ferai aussi une loi de l’être toujours par ma politique. J’ai été également accueilli avec une extrême bienveillance dans la partie du territoire français que j’ai traversée, et j’ai cru voir dans ces démonstrations, auxquelles j’attache un haut prix, le présage heureux des relations de confiance et d’amitié qui doivent exister entre les deux pays. Le résultat de toute commotion publique est de froisser momentanément les intérêts matériels. Je comprends trop bien leur importance pour ne pas m’attacher immédiatement à concourir par la plus active sollicitude à relever le commerce et l’industrie, ces principes vivifiants de la prospérité nationale, mais j’aime à croire que le Peuple belge, si remarquable à la fois par son sens droit et par sa résignation, tiendra compte au gouvernement des difficultés d’une opposition qui se lie à l’état de malaise dont l’Europe presque tout entière est frappée. Je veux m’environner de toutes les lumières, provoquer toutes les vues d’amélioration, et c’est sur les lieux mêmes, ainsi que j’ai déjà commencé à le faire, que je me propose de recueillir les notions les plus propres à éclairer sous ce rapport la marche du Gouvernement. Messieurs, je n’ai accepté la couronne que vous m’avez offerte qu’en vue de remplir une tâche aussi noble qu’utile, celle d’être appelé à consolider les institutions d’un Peuple généreux et de maintenir son indépendance. Mon cœur ne connait d’autre ambition que celle de vous voir heureux. Je dois, dans une aussi touchante solennité, vous exprimer l’un de mes vœux les plus ardents. La Nation sort d’une crise violente, puisse ce jour effacer toutes les haines, étouffer tous les ressentiments ! Qu’une seule pensée anime tous les Belges, celle d’une franche et sincère union ! Je m’estimerai heureux de concourir à ce beau résultat, si bien préparé par la sagesse de l’homme vénérable qui s’est dévoué avec un si noble patriotisme au salut de son pays. Messieurs, j’espère être pour la Belgique un gage de paix et de tranquillité ; mais les prévisions de l’homme ne sont pas infaillibles. Si, malgré tant de sacrifices pour conserver la paix, nous étions menacés de la guerre, je n’hésiterai pas à en appeler au courage du peuple belge, et j’espère qu’il se rallierait tout entier à son Chef pour la défense du pays et de l’indépendance nationale. »

Après cette cérémonie solennelle, le roi offrit un banquet aux différents dignitaires du pays, placé entre l’ancien régent Surlet de Chockier et d’Etienne de Gerlache.

Pendant plusieurs années, les 23, 24, 25 et 26 septembre étaient considérées comme journées de fêtes nationales afin de commémorer les combats de septembre de la Révolution. Il faut attendre 1880 pour que la date du 21 juillet soit considérée comme le fête nationale, ce qui est reconnu dans une loi du 27 mai 1890.

A cette occasion, les drapeaux sont hissés sur les bâtiments en cette date, mais également les 22 et 23 juillet. De nos jours, les célébrations du 21 juillet se caractérisent par un discours du roi à la télévision et un Te Deum en la cathédrale Saints-Michel-et-Gudule de Bruxelles auquel y assiste les souverains, la reine Fabiola et les princes héritiers. Quant aux autres princes, les deux autres couples princiers assistent à d'autres Te Deum de manière à honorer chaque région. La journée se poursuit par une revue des troupes par le roi, un défilé militaire auquel assiste la famille royale et des visites royales et princières à différents stands qui se tiennent au sein de la Fête du Parc (ainsi, habituellement, les souverains visitent le stand des Fournisseurs Brevetés de la Cour de Belgique). La journée se conclut par un feu d’artifice auquel assistent régulièrement certains membres de la famille royale

20 juillet 2011

Mais qui est ce prince de Saxe-Cobourg ?

Léopold, Georges, Chrétien, Frédéric est né le 16 décembre 1790 à Cobourg. Il reçut le même nom que son parrain : l’empereur Léopold II d’Autriche (1790-1792). Il est le huitième enfant du duc François de Saxe-Cobourg-Saalfeld (1750-1806), qui régna de 1800 à sa mort, et de la comtesse Augusta de Reuss-Eberdsdorf (1757-1831). La Maison de Saxe est l’une des plus anciennes d’Europe. Au XVe siècle, elle se divise en deux branches : l’une catholique, l’autre protestante ou dite « Ernestine » à laquelle appartient la famille du prince Léopold.   

Le prince Léopold enfant, âgé de 4 ou 5 ans. A l'arrière
se trouve une dédicace à sa grand-mère paternelle, la
princesse Sophie-Antoinette de Brunswick-Bevern
(1729-1820) qui l'a élevé.
© Palais Royal (pastel anonyme)
A sa naissance, le prince portait le nom de Saxe-Cobourg-Saalfeld, ainsi que les titres de duc de Saxe et prince de Saxe-Cobourg-Saalfeld. Cependant en 1826 son frère aîné, Ernest (1784-1844), alors prince régnant de Saxe-Cobourg-Saalfeld sous le nom d’Ernest III, à l’occasion d’une réorganisation des différents duchés saxons, devient Ernest Ier, duc de Saxe-Cobourg-Gotha. En effet, après avoir cédé Saalfeld aux Saxe-Meiningen, il reçut à son tour Gotha. Cette modification intervient également pour les différents membres de sa Maison : voici pourquoi le prince Léopold est plus connu comme « de Saxe-Cobourg-Gotha », malgré le fait qu’il n’en fut détenteur que cinq années avant de montrer sur le trône belge. 

La petite principauté sur laquelle régnait à sa naissance son grand-père, le duc Ernest (1724-1800), est suite à la victoire d’Iéna de l’armée napoléonienne sur les Prussiens, intégrée à l’Empire de Napoléon. Son père, gravement malade, est décédé avant que ne survienne la paix de Tilsitt en 1807 qui restaura l’indépendance de l’Etat, avec, il faut le noter, la pression du tsar russe. Sa sœur, la princesse Julienne (1781-1860) a en effet épousé en 1796 le grand duc Constantin Pavlovitch (1779-1831), frère du tsar Alexandre Ier.

Gravure aquarellée anglaise d'Henri Meyer d'après
un tableau d'Alfred Chalon (1816)


Le couple divorça en 1820, mais cette alliance permit au jeune Léopold de se familiariser aux combats de l’armée. A 18 ans, il était déjà général de cavalerie de l’armée russe. Mais lors de l’entrevue d’Erfurt, où il accompagna le tsar de Russie devant Napoléon, ce dernier fit comprendre au prince qu’il était dans ses intérêts de quitter l’armée russe s'il désirait que sa famille puisse continuer à jouir de sa principauté. Mais trois ans plus tard, en 1813, il fit son retour dans l’armée russe, se battant à Bautzen, Külm et Leipzig et prenant part à l’envahissement de la France aux côtés des Alliés. En 1815, il représenta son frère et défendit ses intérêts au Congrès de Vienne.

Le 2 mai 1816, à 26 ans, il fait un très beau mariage : il épouse la princesse Charlotte de Galles, âgée de 20 ans, et fille du régent Georges (futur Georges IV) et de la princesse Caroline de Brunswick. Fille unique, elle était alors l’héritière présumée au trône britannique. Après une fausse couche en juillet de l’année 1816, elle est décédée le 6 mai 1817, quelques heures après avoir mis au monde un enfant mort-né de sexe masculin. Léopold, qui se voyait déjà prince consort, est abattu par la mort de son épouse qu’il aimait profondément.

La princesse Charlotte de Galles et le prince Léopold de
Saxe-Cobourg-Saalfeld au théâtre (gravure de 1816)

En 1818, sa sœur Victoria (1786-1861) épousa, grâce à son intercession, le prince Edouard Auguste (1767-1820), duc de Kent et alors héritier présomptif de la couronne britannique suite au décès de la princesse de Galles. De cette union naquit en 1819 une princesse dénommée Alexandrine-Victoria, qui deviendra par la suite reine du Royaume-Uni et impératrice des Indes sous le nom de Victoria. Elle gardera toujours une grande affection pour son oncle Léopold, et elle s’alignera au choix de celui-ci quant à son mariage : le prince Albert de Saxe-Cobourg-Gotha, neveu du futur roi des Belges. 

Veuf, il continua à vivre au Royaume-Uni où il jouissait d’une certaine popularité mais également d’autres privilèges : outre son titre de prince de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, il obtint une importante rente et resta propriétaire de Claremont House. Il voyagea dans toute l’Europe, lui donnant l’occasion d’étayer ses contacts et de continuer à conserver sa réputation à la fois d’homme intelligent, influent mais aussi de charmeur. Il aurait d'ailleurs réalisé un mariage morganatique le 2 juillet 1829 avec une allemande, Karoline Bauer (1807-1878), une actrice qui ressemblait, dit-on, beaucoup à sa défunte épouse et qui était également la cousine du baron Stockmar, personnalité proche de Léopold. Le prince l’aurait alors titrée comtesse de Montgomery avant de s'en séparer en 1831 suite à l’acceptation du trône belge. 

Le prince Léopold portant l'Ordre de la Jarretière.
Dessin de G. Hayten datant de 1816
© Archives du Palais Royal

Dès 1825, la couronne de Grèce, qui s’affranchit du joug ottoman, lui fut offerte. Mais la situation était très compliquée et les insurgés étaient tantôt vainqueurs alors que les ottomans étaient tantôt en passe de reconquérir le pays. Deux années plus tard, le gouvernement anglais fit la même proposition à Léopold, mais des nouvelles invasions se produisirent. Après les insurgés et le gouvernement anglais, c’est fut tour des grandes puissances d’offrir la couronne grecque une nouvelle fois au prince Léopold en février 1830. Cependant, le trône ne fournissait pas assez de garanties à ses yeux et il y renonça le 21 mai. Ironie de l’histoire, c’est le prince Othon de Bavière (1815-1867) qui deviendra le roi de Grèce sous le nom d’Othon Ier en 1833. Ce prince s’était également déclaré candidat lorsque le trône belge était à pourvoir, mais il y avait échoué. Il sera en 1862 déposé suite à un coup d’Etat et remplacé par un prince de Danemark, le roi Georges Ier.  

19 juillet 2011

Leopold de Saxe-Cobourg, le choix pour un roi

Le 18 novembre 1830, peu après le début de la Révolution belge, l’indépendance est proclamée officiellement, même si celle-ci était effective depuis le 4 octobre 1830. A cette date un Congrès National avait déjà été mis en place, à la tête duquel fut placé, après trois tours de scrutin, le baron Erasme-Louis Surlet de Chockier. Le 19 novembre, 173 suffrages se portèrent en faveur d’une monarchie alors que seulement 17 voix s'élevèrent pour une république. Une monarchie constitutionnelle, représentative, avec un chef héréditaire, et dont est exclu perpétuellement tout membre de la Maison d'Orange-Nassau, précédente dynastie qui régna sur la Belgique de 1815 à 1830. Mais à une monarchie, il fallait un Roi. En l'espèce, c'était le Congrès National qui devait se prononcer par le vote afin d'élire un souverain. Cependant, la personne qui aurait été élue devait tout naturellement recueillir l’assentiment des grandes puissances.

Différentes familles nobles étaient bien ancrées en Belgique, et certains de leurs représentants s’étaient d’ailleurs illustrés durant la Révolution. L’une des plus illustres et qui avait donné deux figures aux événements de septembre 1830 était la Maison de Merode, avec les comtes Félix et Frédéric, dont le dernier avait été blessé mortellement aux combats. Néanmoins, ces familles nobles n’appartenaient pas à des familles souveraines et les puissances s’étaient exprimées sur le fait qu’elles verraient un tel acte avec autant de déplaisir que l’avènement d’une république.

Le nom du duc Auguste de Leuchtenberg (1810-1835) circula en janvier 1831. Il était le fils d’Eugène de Beauharnais, fils adoptif de l’empereur Napoléon, et de la princesse Augusta de Bavière. La France était opposée à cette candidature déposée par le baron de Stassart, qui, à l’heure de la Restauration rappelait le souvenir de l’épopée impériale. Face à la candidature de Leuchtenberg, se profila avec plus de chances celle du prince Louis d’Orléans (1814-1896), duc de Nemours, fils du roi Louis-Philippe Ier des Français. Cette candidature trouvait un certain soutien au sein de l’opinion publique, mais certains députés ainsi que les puissances voyaient d’un mauvais œil que le jeune fils du roi de France hérite d’un nouvel État qu’il aurait été très facile pour la France d’annexer. Louis-Philippe était par ailleurs très conscient de la réticence des puissances, avec en tête le Royaume-Uni. La candidature fut tout de même déposée par 52 membres du Congrès.

Un premier scrutin eut lieu le 3 février 1831 opposant le duc de Nemours, le duc de Leuchtenberg et l’archiduc Charles-Louis d’Autriche-Teschen (1771-1847). Ce dernier était le fils de l’empereur Léopold II d’Autriche et avait l’avantage d’être le dernier gouverneur général des Pays-Bas autrichiens. Au premier tour, sur 191 votants, 89 voix allèrent au duc de Nemours, 67 au duc de Leuchtenberg et 35 échurent à l’archiduc. La majorité absolue exigée étant de 96, les résultats imposaient un deuxième tour. Celui-ci fut réalisé avec 192 votants, déplaçant la majorité absolue de 96 à 97 voix. Les résultats étaient les suivants : 97 pour Nemours, 74 pour Leuchtenberg et 21 pour Charles-Louis. Le fils du roi des Français fut donc élu Roi des Belges et une délégation fut envoyée en direction de Paris pour offrir officiellement la couronne au jeune prince.

De gauche à droite : le duc de Nemours (1814-1896), le duc de Leuchtenberg (1810-1835)
 et l'archiduc Charles-Louis d'Autriche-Teschen (1771-1847)


Durant ce temps, des négociations eurent lieu entre le Royaume-Uni et la France, en la personne de Talleyrand. La France était consciente qu’accepter le trône belge pourrait nuire à la paix européenne. Dès lors un accord fut conclu : le duc de Nemours ne montera pas sur le trône et de son côté la puissance britannique rejettera la candidature bonapartiste de Leuchtenberg. Le 17 février 1831, au Palais Royal, le roi Louis-Philippe Ier refusa donc, au nom de son fils, la couronne qui était offerte par la délégation belge qui était composée du baron Surlet de Chockier, du comte Félix de Merode, du comte d'Aerschot, le marquis de Rodes, ainsi que Messieurs Lehon, de Brouckère, Gendebien, Barthélemy, Marlet et l'abbé Boucqueau de Villeraie.

17 février 1831, au Palais-Royal (Paris)
(peinture de Nicolas Gosse, 1836)

Tout était à refaire. D’autres noms, moins plébiscités, avaient circulèrent : le prince Ferdinand de Savoie (1822-1855), duc de Gênes, fils de Charles-Albert de Savoie (futur roi de Sardaigne) ; le prince Charles-Ferdinand de Bourbon-Siciles (1811-1862), prince de Capoue, fils du roi François Ier des Deux-Siciles ; le prince Jean de Saxe (1801-1873), fils de Maximilien de Saxe et qui régnera de 1854 à 1873 sur la Saxe ; ainsi que le prince Othon de Bavière (1815-1867), fils du roi Louis Ier de Bavière et qui deviendra en 1833 le premier roi de la Grèce moderne. Finalement ce furent les candidatures de Charles-Ferdinand de Bourbon des Deux-Siciles, du prince Jean de Saxe et du prince Othon de Bavière qui furent réexaminées.

Charles-Ferdinand, candidature du ministre de France à Bruxelles, était soutenu par la France du bout des lèvres : neveu de la reine Marie-Amélie, née princesse de Bourbon-Siciles, il était également l’oncle du comte de Chambord, prétendant légitimiste au trône de France. Cependant, la candidature avait peu de chance d’aboutir car la Maison auquel le prince appartenait était considérée alors comme l’une des plus réactionnaires d’Europe. Le prince Othon, lui, convenait à l’Allemagne ainsi qu’au Royaume-Uni. Officieusement, il s’agissait également de la carte du roi Louis-Philippe qui voyait déjà une alliance matrimoniale entre ce prince bavarois et l'une de ses filles. Mais l’opinion publique n’appréciait pas ce choix. Dans cette confusion, le prince Frédéric d’Orange-Nassau (1797-1881), second fils du roi Guillaume Ier des Pays-Bas, fit savoir qu’il était prêt à ceindre la couronne belge. Ce prince avait commandé les troupes envoyées par son père à Bruxelles pour calmer les insurgés. La candidature fut d'ailleurs déposée par le député d’Ostende et fit grand bruit au sein du gouvernement provisoire.

De gauche à droite : le prince Charles-Ferdinand de Bourbon-Siciles (1811-1862), le prince Jean de Saxe (1801-1873), le prince Othon de Bavière (1815-1867) et le prince Frédéric d'Orange-Nassau (1797-1881)

Dans cette cacophonie, Paul Delvaux évoqua pour la première fois la personne de Léopold de Saxe-Cobourg et rappela ensuite la candidature du duc de Leuchtenberg. Ce dernier choisit cependant de se désister. Peu à peu, les partisans du prince d’Orange augmentèrent, et on avait déjà eu à réprimer une conspiration orangiste à Gand. Dès lors, le 23 février 1831, le Congrès avec 112 voix pour et 12 voix contre installa une régence provisoire. Elle est dévolue au baron Erasme-Louis Surlet de Chockier, un libéral, élu avec 108 suffrages sur un total de 157, qui fut préféré au comte Félix de Merode.

La candidature du prince Léopold de Saxe-Cobourg apparut alors comme celle qui apportait le plus de garanties. Candidat avancé par le Royaume-Uni, il convenait à la Russie, à l’Autriche, à la Prusse et Talleyrand défendit sa personne auprès de Louis-Philippe. Le 20 avril 1831, une mission belge, composée de quatre membres du Congrès, est envoyée à Londres à la rencontre du candidat idéal. Lors d’une entrevue à Marlborough House, Léopold et le baron Stockmar, un fidèle, reçurent la délégation. Le prince anglo-allemand sembla accepter l’offre qui lui était faite mais demanda que la question des frontières soit réglée tout comme celle de la dette.
Morceau de la proposition faite par les membres de
Congrès de la candidature du prince Léopold
"pour Roi de la Belgique" datant du 25 mai 1831.
Ce document porte la signature de tous les députés
qui patronnèrent cette candidature. Ce document (ainsi
que la deuxième partie) a échappé de peu aux flammes
lors de l'incendie du Palais de la Nation en 1883

© Archives Générales du Royaume

Il déclarait alors : « Pour que mon élection soit possible, et qu’elle soit utile à votre cause, il faut qu’elle emporte la solution de vos difficultés territoriales et financières ; il faut que la Belgique et son roi puissent être reconnus par l’Europe. Je ne saurais accepter la souveraineté d’un État dont le territoire serait contesté par toutes les puissances ; ce serait, sans profit pour vous, me constituer, en mettant le pied sur le sol belge, en hostilité avec tout le monde.

Toute mon ambition est de faire le bonheur de mes semblables. Dès ma jeunesse, je me suis trouvé dans des positions si singulières et si difficiles, que j’ai appris à ne considérer le pouvoir que sous un point de vue philosophique ; je ne l’ai désiré que pour faire le bien, et un bien qui reste. Si certaines difficultés politiques, qui me semblaient s’opposer à l’indépendance de la Grèce, n’avaient surgi, je me trouverais maintenant dans ce pays ; et cependant je me dissimulais pas quels auraient été les embarras de ma position. Je sens combien il est désirable pour la Belgique d’avoir un chef le plus tôt possible ; la pais de l’Europe y est même intéressée.
»

Le 4 juin 1831, Léopold est élu Roi des Belges avec 152 voix pour et 43 voix contre. Alors qu’une délégation, avec à sa tête Adrien de Gerlache, fut chargée de remettre le décret d’élection au prince à Londres, Devaux et Nothomb négocièrent à la Conférence de Londres quant aux limites géographiques du nouvel État, aboutissant à la conclusion du traité des XVIII articles le 9 juillet.

Billet de vote de Jean Baptiste Nothomb
© Archives du Congrès National à la Chambre des Représentants

Le 16 juillet, Léopold est informé de la précédente adoption à la Conférence qui correspondait à ses attentes. Il embarqua donc le jour même vers Calais, accompagné de Jules Van Praet, qui deviendra l’un de ses plus proches collaborateurs, de son aide de camp Sir Henry Seton (qui retournera par lui suite au Royaume-Uni) et de dix serviteurs. Il posa son pied sur le sol belge le 17 juillet à La Panne et passa ensuite par les villes de Furnes, Ostende, Bruges, Gand et Alost. Le 19 juillet 1831, le presque roi Léopold entra à Bruxelles à 22h30. Il fut reçu par le régent, son gouvernement et les membres du Congrès. La prochaine étape se déroula le 21 juillet : Léopold prêta serment et devint le premier Roi des Belges. 

18 juillet 2011

180 ans de la dynastie

Le 21 juillet 2011, cela fera exactement 180 ans que le premier roi des Belges, Léopold Ier, a prêté serment. Cet acte peut être considéré comme fondateur de la dynastie royale belge, même si certains articles de journaux ont célébré le 4 juin, jour où le roi accepta d’être le souverain du jeune royaume, comme date célébrant le 180ème anniversaire de la dynastie.

Aucune célébration spéciale n’aura lieu à cet effet, tout comme en 2010 où la Belgique fêtait son 180ème anniversaire. La crise politique ne se prête pas à des événements comparables à ceux organisés en 2005 à l’occasion des 175 ans de la Belgique et des 25 ans de fédéralisme.

A noter que du 20 au 24 juillet la ville de La Panne vivra aux rythmes de concerts et de spectacles de danses afin de commémorer l’arrivée du roi Léopold Ier le 17 juillet 1831 sur le sol belge. Depuis 2005 où le roi Albert II, son arrière-arrière-petit-fils, s’était rendu dans la station balnéaire à cette occasion, ces célébrations ont été maintenues chaque années jusqu’à aujourd’hui.

Bien sûr, comme chaque année, la fête nationale aura lieu en ce 21 juillet, mais – hélas – sans coloration particulière. Nombreux sont ceux qui fouleront les pavés de la Place Royale, sans savoir qu’il y a 180 ans le destin du royaume de Belgique s’y jouait, là, sur une estrade installée devant l’église Saint-Jacques-sur-Coudenberg… Destin qu’aujourd’hui certains hommes politiques aimeraient remettre en cause, mais ça c’est une autre histoire !

Je vous proposerais à cet effet différents articles : Léopold de Saxe-Cobourg-Gotha, le choix pour un roi (19 juillet) ; un portrait du prince allemand à la veille de son destin royal (20 juillet) ; le déroulement de la journée du 21 juillet 1831 (21 juillet) et quelques photos du 21 juillet 2011 (22 juillet).

Timbre-poste sorti le 26 février 2005, célébrant les 175 ans de la Belgique, avec un accent tout particulièrement pour ces souverains.
On y reconnait les rois Léopold Ier, Léopold II, Albert Ier, Léopold III, Baudouin et Albert II, ainsi que les reines Louise-Marie, Marie-Henriette, Elisabeth, Astrid, Fabiola et Paola.
Le prince Charles, comte de Flandre et régent du royaume de 1944 à 1950 y apparait au centre. Il s'agit du seul timbre (même si dans son cas, il apparait juste sur le feuillet et non le timbre en lui-même) sur lequel figure le prince. Dès projets de timbres-postes avaient bien été créé durant la Régence, mais il avait finalement refuser cet honneur. Jamais jusqu'alors un hommage philatélique ne lui avait été rendu.



Toujours pour les 175 ans de la Belgique, la Poste belge a édité le 21 juillet 2005 son premier timbre en argent. Il représente de profil, le premier roi des Belges, Léopold Ier, et le souverain actuel, Albert II.
Il pourrait très bien correspondre pour affranchir le courrier, d'une valeur postale à 4,00€, il fut vendu 10€ avec sa pochette (contenant un petit texte sur l'histoire de la Belgique, le feuillet présenté au dessus et les paroles de la Brabançonne, l'hymne national).
Il en existe 110.000 exemplaires. A noter qu'il ne s'agit pas là d'une première mondiales, en effet, plusieurs pays ont déjà édités des timbres en argent ainsi qu'en or.




15 juillet 2011

Bal à la Cour luxembourgeoise

Voici plusieurs photos d'un bal organisé à la Cour luxembourgeoise au début des années 1980. Je ne sais pas quelle fut réellement l'occasion de ce bal, il est probable qu'il intervienne afin de célébrer l'union rapprochée des deux filles du grand-duc et de la grande-duchesse. Si c'est le cas, il est fort à penser qu'il eut lieu peu après l'annonce des fiançailles de la princesse Margaretha de Luxembourg avec le prince Nicolas de Liechtenstein en décembre 1981 et peu avant le mariage de la princesse Marie-Astrid de Luxembourg avec l'archiduc Carl-Christian d'Autriche en février 1982.

Si quelqu'un à plus d'informations à ce sujet... ?

La princesse Marie-Astrid de Luxembourg et l'archiduc Carl-Christian d'Autriche (© Collection personnelle)

La princesse Margaretha de Luxembourg et le prince Nicolas de Liechtenstein (© Collection personnelle)

Cette photo met en exergue les différents bijoux portés par les princesses.
La princesse Marie-Astrid porte un diadème en diamants et émeraudes de la maison Van Cleef & Arpels. Il s'agit d'une pièce provenant d'une parure (complétée par un collier) offert à sa mère, Joséphine-Charlotte, par le grand-duc héritier Jean probablement vers Noël 1954 (suite à leur récent mariage célébré en 1953). Marie-Astrid porte également une paire de boucle d'oreille à pendentif (incrustées d'émeraudes) offertes à sa grand-mère maternelle, la princesse Astrid par son époux, le duc de Brabant (futur Léopold III). Quant à son collier, il ressemble à celui qu'elle avait arboré, sous la forme d'un diadème, lors de son mariage.
La princesse Margaretha porte, elle, un diadème de chez Chaumet. Il a été réalisé avec des pièces provenant d'un collier de la grand-duchesse Charlotte, sa grand-mère paternelle. Il peut aussi être porté sous forme de collier (l'actuelle grande-duchesse le porte fréquemment des deux manières) et peut se porter avec ou sans les perles.
(© Collection personnelle)

Les trois couples luxembourgeois de l'année 1981 et 1982 : la princesse Marie-Astrid et Carl-Christian, la princesse Margaretha et Nicolas et enfin, le grand-duc héritier Henri et Maria-Teresa (qui porte un diadème que je n'ai pu identifier).
(© Collection personnelle)

11 juillet 2011

Le Domaine du Stuyvenberg

Le Domaine du Stuyvenberg, propriété de la Donation Royale, se situe à quelques pas du Château royal de Laeken et du Château du Belvédère. D'une superficie de plus de 21 hectares, il abrite plusieurs bâtiments : le Château du Stuyvenberg, qui fut occupé par différents membres de la famille royale, une ferme-château appelée « ferme rose », des dépendances ainsi que la « Villa Schoonenberg » construite au début des années 2000 pour y loger la famille de la princesse Astrid. Après son mariage, le prince Amedeo s'est installé avec son épouse dans l'une des dépendances du domaine. 

1. La ferme rose
2. Le Château du Stuyvenberg (ancienne résidence des reines Elisabeth puis Fabiola)
3. Villa Schoonenberg, résidence de la princesse Astrid
4. Dépendance, occupée par le prince Amedeo

L'ancien château, datant du XVIIIe siècle, est le bâtiment le plus ancien du domaine. Son appellation de « ferme rose » est due à ses briques rouges. Les lieux appartenaient au XVIe siècle à Louis Van Bodeghem, architecte qui fut au service des ducs de Bourgogne puis des rois d'Espagne. Les terres furent vendues par son fils en 1602, puis de nouveau en 1703 par Jeanne Françoise Hannosset, veuve du fils du seigneur de Moerbeek. L'acquéreur était alors Joachim Joseph Sirejacob. C'est lui qui entreprit de reconstruire une ferme avec une tour à cinq étages au fronton de laquelle est inscrit le millésime « 1713 ». Les travaux furent achevés en 1725.

Dessin de F.J. Derons

La ferme-château passa à sa fille, Marie-Françoise Sirejacob, puis en 1796 au fils de cette-dernière, François-Charles-Joseph De Leeu de Moorsele. Son petit-fils, le baron François de Wolff de Moorsele, qui en avait hérité en 1811, vendit la propriété le 8 novembre 1829 à Marc-Julien Deby, plus tard bourgmestre de Laeken. Il en resta propriétaire pendant un peu plus de dix ans puisqu'il remit le bien à l'Etat en 1840, moyennant une somme de 131.450 francs. Et enfin, dans un mouvement d'échange de terres, le roi Léopold II en fut propriétaire en 1880.



Neuf ans plus tard, en 1889, le roi Léopold II acquit une autre propriété, contiguë de la précédente. A l'origine, ces terres furent achetées en 1801 et 1802 par la famille Ruzette dont l'un de ses représentants, Emmanuel, fut bourgmestre de Laeken. Le 2 décembre 1840, alors qu'il venait de céder l'ancien château, Marc-Julien Deby s'octroya les lieux qui dépassaient à peine les trois hectares. Il y fit édifier le Château du Stuyvenberg, appelé aussi « Stelebosch ». Une construction blanche, dans un style néoclassique et d'un confort naturellement supérieur à la ferme-château. En 1850, le domaine fut une nouvelle fois vendu. Le nouveau propriétaire, Jean-Michel Huhleim, n'occupa en fait jamais les lieux et revendit le bien pour 80.000 francs le 16 juin 1851 à Arcadie Claret, épouse de Frédéric Meyer, qui n'était autre que le maîtresse du roi Léopold Ier. On peut d'ailleurs penser que le précédent propriétaire n'était qu'un homme de paille du souverain. L'acte de vente faisait alors état d' « une maison de campagne avec écuries, remises, jardins, maison de jardinier, terre, pré et dépendances ».



Arcadie Claret vivait auparavant rue Royale, où elle subissait souvent les foudres de la population. Installée au Château du Stuyvenberg, renommée pour l'occasion « Campagne Meyer », elle était davantage au calme et le roi Léopold Ier pouvait lui rendre visite plus souvent. C’est là que naît d'ailleurs, le 25 septembre 1852, le second fils naturel du souverain et de sa jeune maîtresse, Arthur, qui sera titré plus tard Baron von Eppinghoven. A la mort du roi en 1865, la maîtresse royale quitta la Belgique pour s’installer en Allemagne, sur des terres que lui avait léguées Léopold Ier. Le domaine fut alors laissé à l’abandon. Par l'entremise d'un homme de paille, le capitaine Léonce Hubert Marlier, Léopold II en fit l'acquisition le 9 mars 1889 pour une somme de 140.000 francs. 



L'ancien château et le Château du Stuyvenberg étaient enfin réunis en 1889 sous l'égide d'un même propriétaire. Le mur séparant les deux propriétés fut abattu alors qu'une enceinte encercla l'ensemble du domaine d'une superficie de 21 hectares, 32 ares et 70 centiares. Le roi Léopold II fit appel aux architectes Alphonse Balat et Emile Lainé pour d'importantes rénovations dès 1890. Le Château du Stuyvenberg, qui s'est vu agrémenté d'une tourelle à l'extrémité de l'aile gauche, porte d'ailleurs le monogramme du souverain sur le fronton de la façade du côté sud. Un pont, surplombant un ravin, fut même aménagé pour relier les deux bâtisses. Le château-ferme fut utilisée comme laiterie royale. Le 9 avril 1900, le roi Léopold II cède le Domaine du Stuyvenberg à la Donation Royale. 



A la fin de l'année 1927, des travaux y furent entrepris par l'architecte Heyminx en prévision de l'installation du prince héritier Léopold et de la princesse héritière Astrid. Des rénovations étaient nécessaires puisque des fissures étaient visibles. Les prospections relevèrent d'ailleurs que certains murs avaient été construits sur du sable. L'estimation du coût des travaux passa de 750.000 francs à 1.900.000 francs en mars 1928 ! Le jardin à la française fut également redessiné. Les ducs de Brabant de l'époque s'y installèrent en 1929 et c'est au Château du Stuyvenberg que naquit le prince Baudouin en 1930, suivi du prince Albert en 1934. Veuf, le roi Léopold III quitta cette résidence avec ses trois enfants pour le Château royal de Laeken. 


La reine Astrid confectionnant un bouquet de fleurs dans l'entrée du
Château du Stuyvenberg

Il fallut attendre l'année 1951 pour que le Château du Stuyvenberg retrouve une affectation avec la venue de la reine Elisabeth, la veuve du roi Albert Ier. Suite au retour d'exil de la famille royale en 1950, le Château royal de Laeken voyait cohabiter le roi Léopold III et sa seconde épouse la princesse Lilian, la princesse Joséphine-Charlotte ainsi que les princes Baudouin, Albert et Alexandre, qui seront par la suite rejoints par Marie-Christine et Marie-Esméralda. Et l'abdication du roi Léopold III et la délégation des pouvoirs royaux au prince Baudouin ne changèrent rien à cette situation. La reine Elisabeth qui vivait alors depuis la Seconde Guerre mondiale au Pavillon des Palmiers, une dépendance du Château royal de Laeken, fut priée de s'installer au Château du Stuyvenberg. Elle y emménagea le 28 janvier 1951. La demeure avait connu alors une modification : la tourelle avait été détruite au profit d'un agrandissement de l'aide gauche.

Façade côté sud (chambre de la reine Elisabeth marquée) 

Façade côté nord

La reine Elisabeth, comme elle le faisait auparavant, continua à recevoir dans sa nouvelle demeure de nombreuses personnalités, telles que François Périer, André Maurois, Paul Claudel, Popov, Maurice Chevalier et bien d’autres. Le Château du Stuyvenberg accueillait également ses fidèles compagnons : deux chiens de berger et un perroquet, prénommé « Cocotje », ramené du Congo. La salle à manger servait de salle de réception. Un lieu où se mélangeaient souvenirs de guerre, photos, tableaux peints par elle-même ou Laermans, Servaes ou encore Paulus. Un atelier de peinture et de sculpture, dont elle eut la jouissance au Château royal de Laeken, fut construit dans le parc du Stuyvenberg. Ce bâtiment, appelé la « Toontje », a été détruit en 1982.

Studio de la reine Elisabeth
Atelier de peinture et de sculpture de la reine Elisabeth

Dans son ouvrage paru en 1976, « Elisabeth de Belgique. Reine de cœur, Reine des arts », le baron Carlo Bronne y donne une description de l'ambiance au sein du domaine et de la demeure de la souveraine : « Derrière la maison blanche descendait un gazon velouté, encadré par deux longues plates-bandes débordantes de fleurs aux couleurs vives où picoraient des faisans. L’horizon était bordé par des massifs au-delà desquels flottait dans la brume le dôme du palais de Justice. A l’intérieur, des salons gris et beiges conduisaient à une vaste pièce à la fois bibliothèque, salon de musique, cabinet de travail, exact reflet de la personnalité multiple de l’hôtesse. Les étagères étaient chargées de livres et de disques. Sur les rayons, des biographies de compositeurs voisinaient avec des ouvrages de philosophie bouddhique. Deux chouettes de bronze regardaient un orchestre, en porcelaine, d’anges musiciens offert par Philip Newman. Un Stradivarius reposait sur le piano à queue. Des fauteuils, un canapé recouverts de toile de Jouy lumineuse engageaient aux entretiens confiants. Des bustes du prince Albert, de la princesse de Grèce, du frère de l’auteur, Louis-Guillaume de Bavière, personnalisaient le salon où passèrent tant de visiteurs de marque ».

Avec l'orchestre offert par Philip Newman
Chapelle ardente dans le hall du Stuyvenberg

La reine Elisabeth est décédée au Château du Stuyvenberg le 23 novembre 1965. Le lendemain, l'acte de constat du décès était signé en présence des membres masculins de la famille et de sa fille la reine Marie-José. Une chapelle ardente fut installée dans l'entrée avant qu'une cérémonie d'absoutes ait lieu, précédant la translation du corps vers le Palais de Bruxelles. A partir de ce moment, la Donation Royale mit la résidence à la disposition du Ministère des Affaires Étrangères qui en fit une résidence pour les hôtes de marques étrangers de passage en Belgique. Le château accueillit également à plusieurs reprises des négociations gouvernementales comme celles qui amenèrent aux « Accords du Stuyvenberg » en 1978.  



Vue à l'intérieur au moment de l'arrivée
de la reine Fabiola
Le Domaine du Stuyvenberg a retrouvé une vocation royale dès l'année 1996. Il fut alors décidé que la reine Fabiola, veuve du roi Baudouin depuis 1993, irait s’y installer. Quant à la ferme-château, elle abriterait la Maison de la Reine Fabiola. Des travaux de rénovation furent nécessaires. C’est en 1998 qu’elle y emménagea, semble-t-il à contrecœur. Elle s'y installa avec sa dame d'honneur, la comtesse Solange de Liedekerke de Pailhe. Dans la biographie de la souveraine écrite en 2008, « Fabiola. Une jeune fille de 80 ans », Bigritte Balfoort et Joris De Voogt décrivaient la demeure comme suit : « Contrairement aux différentes pièces qu'elle occupait au château de Laeken avec Baudouin, le château du Stuyvenberg n'est pas aménagé de manière aussi sobre et aussi dépouillée. Les initiés qui y viennent en visite racontent que la Reine y vit parmi des centaines de souvenirs de son époux donnant à son intérieur, tout comme le fait son style vestimentaire, un caractère plus joyeux mais aussi plus éclectique ». Certains évoquèrent même un bric-à-brac, « fort chargé, de choses pas toujours bien assorties ni toujours de grande valeur ». La reine Fabiola y recevait certains visiteurs étrangers, comme la princesse Sirindhorn de Thaïlande qui y effectua plusieurs séjours.





En 2002, après avoir occupé une villa à l'arrière du Palais de Bruxelles, la princesse Astrid et sa famille s'installèrent dans une nouvelle bâtisse au sein du Domaine du Stuyvenberg. Nécessitant trois ans de travaux et dotée d'une piscine intérieure, la Villa Schoonenberg, reprenant le nom initial du Château royal de Laeken, coûta 1,8 millions d'euros à la Donation Royale. A quelques mètres de la demeure, un court de tennis a vu le jour. Plusieurs événements familiaux y furent célébrés comme les 18 ans du prince Amedeo en 2004 ou les 50 ans de la princesse Astrid en 2012. Autant de rares occasions pour les journalistes et les photographes de pénétrer dans le domaine. La reine Fabiola est décédée au Château du Stuyvenberg le 5 décembre 2014. Selon le Palais, il n'est pas impossible que la résidence puisse être remise à disposition du gouvernement avant qu'elle voit le retour d'un membre de la famille royale.



Après son mariage avec Elisabetta Maria Rosboch von Wolkenstein à Rome en 2014, le prince Amedeo chercha à obtenir un poste à Bruxelles, ayant la volonté de vivre en Belgique auprès de ses parents. La presse a indiqué qu'il avait emménagé dans une dépendance du Domaine du Stuyvenberg, situé juste en face de la Villa Schoonenberg. Cette demeure de briques rouges était à l'origine des remises à côté desquelles se trouvait une volière. Il n'est pas impossible que cette habitation ait été habitée plus récemment par des membres du personnel. 




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