29 novembre 2011

2ème anniversaire du décès du prince Alexandre

Aujourd'hui cela fait exactement deux ans que le prince Alexandre nous a quitté. Ce souvenir possède une résonance tout à fait particulière puisque j'avais eu la chance de pouvoir assister aux funérailles, célébrées le 4 décembre en l'église Notre-Dame de Laeken, lors d'un jour froid et pluvieux. En cette occasion, j'avais collaboré à l'écriture d'un article sur le site Noblesse & Royautés ainsi que sur le blog de la famille royale belge

Faire-part de décès (Collection personnelle)

Faire-part de décès (Collection personnelle)

Livret des funérailles (dans la précipitation, le livret porte la date erronée du 4 novembre au lieu du 4 décembre)
(Collection personnelle)
La Poste en Belgique permet de créer des timbres personnalisés. A l'initiative de la princesse Léa, des timbres à l'effigie du timbre ont donc été imprimés (© Collection personnelle)


Depuis qu'elle est veuve, la princesse Léa met un point d'honneur à défendre la mémoire de son mari. Déjà en 2007, la princesse avait publié un ouvrage illustré de photos inédites à l'occasion du 65ème anniversaire de celui qu'elle appelait affectueusement "Schatzi" afin que les Belges découvrent (ou redécouvrent pour les plus anciens) un prince méconnu et discret.

Inauguration de l'exposition consacrée au prince Alexandre (© Ville de Waterloo)

En 2010, un an après le décès de son époux, elle met sur pied une petite exposition au Musée communal de Waterloo, juste à côté de la salle qui accueille une reconstitution du bureau du roi Léopold III. L'inauguration s'est déroulée en présence de la princesse Marie-Esméralda, du prince Laurent et de la princesse Claire de Belgique. La princesse publie également "Une année sans Toi", livre de quelques pages, illustré de nouvelles photos inédites, où tel un journal intime Léa se répand sur l'année qui a suivi le départ du prince Alexandre et la difficulté de combler le vide qu'il a laissé dans sa vie. Les bénéfices réalisés sur la vente de ce livre sont destinés au Fonds d'Entraide Prince et Princesse Alexandre de Belgique. La princesse continue à s'investir au sein du Fonds, et ce sont les projets portant sur les personnes atteintes de la schizophrénie qui seront soutenus en 2012. 

Le 25 juin 2010, l'Association des Vétérans du Roi Léopold III en l'occasion de leur 50 ans d'existence, ont non seulement rendu hommage au quatrième roi des Belges mais aussi au prince Alexandre. La princesse Léa y était présente. Le 30 juin, Léa a remis un prix scientifique Prince Alexandre de Belgique à l'Institut Von Karman.  

Comme en 2010, la crypte royale, située en l'église Notre-Dame de Laeken, est ouverte au public le 29 novembre, de 14 à 17 heures. Il s'agit d'un hommage exceptionnel rendu tout spécialement au prince Alexandre puisque la crypte n'est qu'accessible que quelques jours par an au public. 


Ce même 29 novembre la princesse assistera à l'avant-première d'un film documentaire consacré au prince Alexandre. Nicolas Delvaux, le réalisateur, est déjà connu pour le film "Léopold III, mon père", diffusé l'année passée. C'est dans le cadre de ce précédent travail que le réalisateur avait rencontré le prince, quelques temps avant son décès, durant environ quatre heures. Pour ce portrait du prince Alexandre, Nicolas Delvaulx a interviewé sa veuve la princesse Léa, sa sœur la princesse Marie-Esméralda, le comte de Paris, le roi Siméon de Bulgarie, la princesse héritière Margarita de Roumanie, Stéphane Bern, le professeur Christian de Duve, l'ex-premier ministre Mark Eyskens, le ministre d'Etat Herman De Croo, Francis Balace et Christian Laporte. Ce film de 52 minutes sera diffusé le vendredi 2 décembre sur la RTBF qui l'intégrera à une émission spéciale de "C'est du Belge" (entre 20h15 et 21h55).

Dans le courant de l'année 2012, la princesse Léa décernera deux prix littéraires Prince Alexandre, l'un francophone et l'autre néerlandophone. Ayant rappelé le goût des sciences de son défunt époux en 2010, elle mettra donc l'année prochaine en exergue la passion pour la lecture du prince. Il n'était en effet pas rare que le prince dévore un livre par jour, préférant cela aux mondanités. 

Merci à Petit Belge pour certaines informations !

22 novembre 2011

Décès de la princesse Elisbeth de Luxembourg

Son Altesse Royale la princesse Elisabeth de Luxembourg, sœur du grand-duc Jean de Luxembourg et tante de l'actuel Grand-Duc est décédée ce mardi 22 novembre 2011.
Née le 22 décembre 1922 au château de Berg, elle était la fille de la grande-duchesse Charlotte et du prince Félix de Bourbon-Parme. Elle avait épousé le duc Franz de Hohenberg en 1956. Mère de deux filles, les princesses Anna et Sophie, elle était sept fois grand-mère. Les funérailles auront lieu à Artstetten en Autriche à une date qui reste encore à préciser. Une messe sera célébrée en l’église Saint-Michel à Luxembourg. La date du service religieux sera prochainement communiquée.
Royalement Blog rendra prochainement un hommage à la princesse Elisabeth.
 

10 novembre 2011

30ème anniversaire du grand-duc héritier Guillaume


A l'occasion du 30ème anniversaire du grand-duc héritier Guillaume de Luxembourg, Royalement Blog s'est associé avec Noblesse & Royautés afin de réaliser un portrait du prince : lien

Le grand-duc héritier dans son bureau du Palais grand-ducal (© RTL)
Voici un entretien du grand-duc héritier accordé à la presse luxembourgeoise :

Monseigneur, vous allez avoir 30 ans dans quelques jours. Comment allez-vous fêter cet événement ?

J'ai invité quelques amis à fêter mon anniversaire, ici au Luxembourg. J'en profite aussi pour montrer le pays à ceux qui ne le connaissent pas encore. On fera une petite soirée décontractée dans un cadre intime.

Vous parlez d'une fête décontractée... mais vous n'avez pourtant pas les mêmes libertés que d'autres jeunes de votre âge.

Oui, mais c'est ma réalité et je l'ai acceptée. Et il faut dire que c'est une chance de vivre au Luxembourg où je peux, par exemple, aller au cinéma sans problème. Et puis, je me rends souvent à l'étranger où j'ai également la possibilité de vivre pleinement ma vie privée.

Avez-vous l'impression d'avoir pu vivre une jeunesse "normale" ?

Heureusement oui. Mes parents m'ont énormément préservé quand j'étais jeune. J'ai fait mon école primaire à Lorentzweiler où j'étais un enfant comme les autres. Mais il est vrai que j'ai eu un peu plus de soucis quand je suis arrivé au lycée à Luxembourg. J'y ai remarqué, tout de suite, que mes camarades me traitaient différemment. C'était très dur pour moi, surtout au début. Après la quatrième, je suis parti à l'étranger. C'est là que j'ai pu pleinement profiter des années de "teenager".

Est-ce que c'est plus facile ou plus difficile, quand on est prince, de rencontrer quelqu'un ?

C'est plus facile et plus difficile. Vous pouvez imaginer qu'il faut vraiment faire la part des choses. Il faut être très au clair avec ce qu'on recherche et s'assurer que la personne en face de vous est vraiment là pour ce que vous êtes et non pas pour ce que vous représentez. Mais je pense sérieusement à fonder une famille. J'ai eu la chance de grandir avec de nombreux frères et sœur et c'est une chose que j'aimerais aussi pouvoir donner à mes enfants.

Comment vous préparez-vous à votre future fonction de Grand-Duc ?

J'ai grandi tout en sachant qu'un jour, j'allais devenir Grand-Duc. L'éducation que mes parents m'ont donnée était basée sur ce fait. Aujourd'hui, mon rôle de Prince héritier m'aide à me préparer à ma future fonction. Au Conseil d'État, je me familiarise avec le volet législatif de notre pays. Et les missions économiques me permettent de comprendre quel regard l'étranger porte sur le Luxembourg. Enfin, j'ai commencé à m'intéresser au business social et aux préoccupations des jeunes, ce qui me permet aussi de me préparer à l'avenir.

Comment interprétez-vous votre rôle dans les missions économiques ? 

Mon rôle est de faciliter le contact avec les entreprises étrangères. Le ministre dirige les négociations, moi j'ouvre les portes. Cela vaut surtout pour les États du Golfe, où ma présence est beaucoup appréciée, ce qui aide beaucoup les entreprises luxembourgeoises.

Quelle est, à votre avis, la perception du Luxembourg dans les pays où vous vous rendez pour vos missions économiques ?

On connaît le Luxembourg, mais seulement du point de vue des finances. Mais le Grand-Duché est aussi un pays qui développe son industrie, notamment dans le domaine des technologies de l'information et de la logistique. Je pense que de ce point de vue, les connaissances ne sont pas encore assez complètes à l'étranger, d'où la nécessité d'y retourner régulièrement.

Ne jouez-vous pas aussi un rôle politique dans le cadre des missions économiques ainsi qu'au Conseil d'État ?

Je ne pense pas. Le Conseil d'État est un organe consultatif, donc évidemment il joue un rôle clé, mais pour moi ma fonction de conseiller est avant tout une école. Dans le cadre des missions économiques, je reste en dehors de la politique. Je suis là pour promouvoir les entreprises luxembourgeoises et non pas pour suivre une politique ou une autre.

Quels sont les souvenirs les plus marquants que vous gardez de vos nombreux voyages à l'étranger ?

Je garde un très bon souvenir de mon séjour au Népal avec les scouts. C'était mon premier contact avec la misère qui existe malheureusement sur cette terre. Ce séjour m'a beaucoup touché. J'y ai appris une leçon pour la vie.

À quoi ressemble une journée typique dans la vie d'un Grand-Duc héritier ?

Un journée typique, c'est compliqué... Je parlerais plutôt d'une semaine typique, car j'ai un programme très chargé. Le lundi, nous faisons l'agenda de la semaine avec mes parents. Et quand leur semaine est trop chargée, ils me délèguent les rendez-vous qui m'intéressent. Le reste de la semaine, je travaille ici au Palais. Je prépare mes voyages et les réunions du Conseil d'État.

Votre agenda est donc bien rempli. Vous reste-t-il du temps pour vos hobbies ?

Oui. J'essaie de jouer au tennis deux fois par semaine, mais j'avoue que ces trois dernières semaines, je n'ai pas réussi à garder ce rythme. Le soir, j'aime bien aller au cinéma, inviter des amis pour manger ou jouer de la guitare. Le weekend, j'en profite pour voir mes amis, soit ici au Luxembourg, soit à l'étranger. J'aime beaucoup voyager, de préférence en Europe. J'aime bien des villes comme Bruxelles ou Genève.

Que répondez-vous aux personnes qui vous reprochent d'avoir une vie facile ?

Je les invite à venir voir (rires). On ne le croirait peut-être pas de l'extérieur mais le Palais est une minienterprise. Représenter au mieux le Luxembourg est un vrai travail. Il demande beaucoup de préparation, le rythme est très exigeant et les journées chargées. Nous sommes loin des 40 heures en tout cas.

Comment décririez-vous votre caractère? Quelles sont vos forces et vos faiblesses ?

On dirait un entretien d'embauche… (rires) Alors commençons par mes forces: j'ai beaucoup de facilités pour aborder les gens, je pense que j'ai hérité cette qualité de ma mère. Mes faiblesses… (il réfléchit) chacun a des domaines dans lesquels il veut s'améliorer. Moi j'essaie de me cultiver toujours plus, de pratiquer la lecture, mais je dois avouer que parfois je suis un peu trop négligent dans ce domaine.

Si vous n'aviez pas été prédestiné pour être Grand-Duc, quel métier auriez-vous choisi ?

J'ai fait des études de sciences politiques, ce qui englobe de nombreuses disciplines. J'ai beaucoup apprécié les cours d'histoire, d'économie et de philosophie. Et je pense que le cas échéant, j'aurais approfondi l'économie et la philosophie pour trouver un travail dans un des deux domaines. J'aurais peut-être créé ma propre entreprise.

Quels sont vos grands projets pour les années à venir ?

J'ai envie de motiver les jeunes à s'engager. À oser fonder une entreprise, par exemple, ou à s'engager dans le domaine social. Il existe de nombreuses associations de jeunes très dynamiques et c'est un domaine que j'aimerais soutenir.

Si vous deviez devenir Grand-Duc demain, est-ce que vous seriez déjà prêt à le faire ?

Non, je pense qu'il me faudra encore plusieurs années d'apprentissage dans le domaine de la connaissance surtout. Mon père est un homme qui a une connaissance extraordinaire, grâce à son expérience. Et je crois que c'est ce qui me manque et ce que seul le temps peut vraiment résoudre. 

Comment voyez-vous votre rôle en tant que futur Grand-Duc ?

Le rôle de Grand-Duc est encastré dans la continuité et la tradition. Mais en même temps, je pense que je ne suis pas comme mon père, et je ne ferai sans doute pas tout comme lui. C'est une question de caractère et de tempérament. J'ai une façon d'agir qui est différente de mon père. Mais je pense qu'en général, le plus important c'est que je reste moi-même.

Vous distinguez-vous de vos jeunes collègues européens dans votre façon d'aborder votre future fonction ?

Quand je les vois, nous discutons beaucoup de l'avenir de la monarchie en Europe et je crois que nous sommes tous d'accord sur un fait: nous devons regarder en avant et respecter les attentes de nos peuples, sans oublier notre histoire.

Où situez-vous la monarchie de nos jours ?

La place de la monarchie est en dehors de la politique. Le chef de l'État a un rôle d'arbitre et c'est une bonne chose. Or, montrer l'identité des Luxembourgeois à l'extérieur fait également partie de nos responsabilités. Nous devons jouer ce rôle avec beaucoup de dignité. Enfin, nous devons également assurer la continuité que la monarchie a connue jusqu'à ce jour au Grand-Duché, sans pour autant avoir peur de prendre des initiatives qui n'existaient pas avant. Les princes héritiers ont tous leurs propres engagements dans le social ou l'environnement, qui sont des domaines dont ne se mêlait pas la monarchie à l'époque. Personnellement, je m'intéresse au "social business" et j'ai un bon contact avec les jeunes. Et leur regard sur moi est respectueux et chaleureux. Donc je ne me fais pas trop de soucis.

En 2009, les pouvoirs du Grand-Duc ont été modifiés. Qu'en pensez-vous ?

Pour commencer, je dirais que c'était quelque chose de souhaitable. Mon père voulait qu'on change la Constitution pour qu'il y ait un respect réel de la séparation des pouvoirs. Il y avait une immixtion de l'exécutif dans le législatif qui n'avait pas de raison d'être. Grâce à cette réforme, il y a plus de logique. Je remercie mon père réellement parce qu'il avait le droit d'avoir un conflit de conscience à l'époque. Une telle situation ne se représentera plus jamais grâce à sa décision.

Êtes vous croyant ?

Oui, je crois en Dieu et je l'assume. Je vais régulièrement à la messe.

Comment expliquez-vous l'attachement de la communauté portugaise à la maison grand-ducale ?

Nous avons aussi du sang portugais dans notre famille (rires). Je trouve que l'intégration des Portugais a vraiment très bien fonctionné. Ils se sentent Luxembourgeois, ils parlent la langue et ils apprécient notre famille. Nous en sommes très reconnaissants.

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Sur Eldoradio pendant une heure (© Eldoradio)
En cette occasion, le grand-duc héritier a multiplié les interviews, notamment à la radio, où il a pour la première fois parlé publiquement de la relation qu'il entretient avec une jeune femme depuis un an. Belge, il l'a déjà rencontré voici 5 ans. Cependant , il précise qu'il est prématuré de parler déjà de mariage. Le couple vit leur histoire d'amour à l'étranger pour préserver au maximum leur intimité.


La chaîne RTL a quant à elle diffusé un reportage mêlant images d'archives et un entretien avec le grand-duc héritier. La plupart de ses images seront reprises pour le reportage de l'émission belge "Place Royale" de RTL-TVI.

1ère partie du reportage
2ème partie du reportage


8 novembre 2011

La famille royale belge et la Chine

Le roi Léopold II fut le fondateur de l'empire colonial belge avec sa pièce-maîtresse, le Congo. Mais bien avant qu'il ne s'intéresse au centre de l'Afrique, celui qui n'était alors que duc de Brabant lorgnait alors du côté chinois. Son père, Léopold Ier, avait échoué dans ses diverses tentatives de doter le jeune royaume belge de territoires d'outre-mer : il avait essayé d'acheter les îles Féroé au Danemark et les Philippines à l'Espagne, et avait tenté d'établir des comptoirs en Crète, aux Antilles, en Guinée, sur la Côte d'Or ou encore en Nouvelle-Zélande. Il n'avait pas été plus chanceux quant à son envie d'une concession en Ethiopie ou de mettre sur pied des protectorats au Nicaragua, au Guatemala ou au Salvador...

En 1859, la France et le Royaume-Uni mirent sur pied une expédition militaire punitive en Chine. Le roi Léopold Ier vit en cet événement l'occasion d'y établir un comptoir belge. Pour cela, il compta participer à l'expédition en envoyant un bataillon belge. Le monarque belge obtint même une entrevue avec l'empereur Napoléon III qui se déroula à Biarritz. Il y exposa alors ses plans et avoua s'intéresser surtout à l'île de Yang Tsé Kiang. Les deux personnages se mirent d'accord sur l'envoi d'environ mille soldats belges et sur la participation aux frais de la Belgique. Cependant, le Royaume-Uni s'opposa à cet accord et le parlement belge n'accepta pas de financer, même en partie, l'expédition. L'une des dernières tentatives colonialistes du premier roi des Belges tomba alors à l'eau. L'âge se faisant, il ne s'y intéressa plus.



Le prince héritier Léopold dès qu'il fut sénateur de droit a prononcé des discours dans la haute assemblée afin que les hommes politiques belges aient conscience de l'importance des colonies pour les pays européens. Alors que de nouveaux comptoirs s'ouvraient en Chine au profit des occidentaux en 1864, il réitéra ses visées pour le royaume dont il sera un jour le chef de l'Etat. Il déclara même vouloir acheter l'île Formose, d'une superficie de 36.000 km², et qui deviendra plus tard Taïwan. Vers la fin de cette même année, il embarqua pour un voyage qui l’emmena à la découverte de l'Extrême-Orient, des Indes, et aussi de Hong Kong et de Canton où il arriva au début de l'année 1865. Il dut cependant écourter son périple et revenir au plus vite en Belgique car son père était souffrant.

Devenu roi, suite au décès de son père à la fin de l'année 1865, sa nouvelle position le faisait encore rêver à des contrées lointaine où le drapeau belge pourrait un jour flotter. En 1868, il revint à la charge et émit le projet de créer une société internationale qui financerait des chemins de fer et des entreprises minières en Chine. Toujours dans l'optique de ce projet, il réunit en 1873 à Liège divers industriels belges du fer et de l'acier. Il pensait qu'une convergence des efforts pourrait aboutir à l'obtention de concessions. Au final, seul Cockerill fut envoyée du côté de Yang Tsé Kang, sans résultat probant cependant... Au cours du temps, le roi Léopold II comprit que le vent lui serait davantage favorable en Afrique. Bien qu'ayant obtenu la reconnaissance de l’État Indépendant du Congo, avec lui-même comme souverain, lors de la Conférence de Berlin de 1885, il restait tout autant attiré par les contrées chinoises. Il déclara d'ailleurs en 1888 : "Je voudrais préparer un Macao chinois au Congo, et un Macao congolais en Chine ! Partout on repousse les Chinois. Je voudrais les accueillir !".

Li Hung Chang (1823-1901)
En 1896, le mandarin Li Hung Chang était en tournée en Europe. Il s'agissait de la troisième personne la plus importante de l'Empire chinois. Léopold II arriva à obtenir de celui-ci qu'il passe par Bruxelles. La rencontre déboucha sur l'obtention d'un contrat portant sur la construction et l'exploitation d'une voie ferrée de 1.200 kilomètres entre Pékin et Hankow. La direction des opérations, qui débutèrent en 1898, fut confiée à Jean Jadot. En parallèle, des négociations s'ouvrirent pour une concession à Hankow. Une mission belge fut également envoyée dans la région du Kansu, dont le roi aurait aimé en faire un Katanga chinois. Quant à la ligne de chemin de fer obtenue, des tractations sur l’extension du tronçon vers Canton débouchèrent sur la victoire des Américains. Léopold II, perdant, arriva tout de même à acheter le tiers des actions de la S.A. American Chinese Development Compagny. A la veille du XXe siècle, sous l'impulsion du monarque, la Société d'Etudes des Chemins de fer en Chine vit le jour en 1899. Elle était destinée à favoriser l’industrie et le commerce entre la Belgique et la Chine.

En 1900, les puissances étrangères envoyèrent en Chine des troupes afin de faire face au soulèvement des Boxers qui souhaitaient se débarrasser des étrangers. A l'instar de son père, Léopold II proposa d'envoyer un contingent belge mais cette fois-ci ce fut l’Allemagne qui exprima son désaccord. Mais alors que la Russie annexa un territoire de la région du Tien-Tsin (Tianjin), sur les rives de la Mer Jaune, le vice-consul de Belgique en Chine, sous les ordres de son souverain, annonça le 7 févier 1900 que la Belgique prenait possession, elle, d'une cinquantaine d'hectares. L'annexion russe fut condamnée par le Royaume-Uni et les États-Unis, tout comme l'initiative belge. Finalement, les quelques hectares furent acquis en 1902, avec l'appui du Comptoir de Chine. Cette société était une filiale de la S.A. Société Asiatique, fondée en 1901 par Léopold II afin de réaliser des combinaisons financières. Sa gestion avait été offerte au baron Empain qui s'occupait des études, du financement et des négociations sur le terrain. En 1904, la Belgique obtint d'ailleurs le monopole pour la production électrique de la concession, via la Compagnie de Tramways et d'Eclairage de Tien-Tsin. Ce contrat fut, en 1906, étendu à toutes les autres concessions étrangères de la région. La concession belge, située sur la rive orientale du fleuve Hai Hen, a été exploitée par la Belgique jusqu'en 1931. Elle n'a pas beaucoup été développée, le gouvernement belge s'en désintéressant complètement. Il n'existe donc aujourd'hui aucune trace de l'occupation belge sur ces lopins de terre chinois. 

Les concessions étrangères à Tien-Tsin en 1912


Bien des années plus tard, la reine Elisabeth, veuve du roi Albert Ier, fut l'une des premières personnalités occidentales à se rendre en Chine en pleine Guerre froide. Depuis Moscou, Elisabeth et sa fille la princesse Marie-José, éphémère reine d'Italie, prirent, le 24 septembre 1961, un Tupolev à destination de Pékin. Alors que la Belgique et la Chine n'entretenaient alors pas de relations diplomatiques, la reine rencontra Mao Tsé-Tung et fut reçue, sur le parvis de l'Assemblée nationale, par le Premier ministre Chou En-Lai. Elle fut également accueillie par l'Académie des Sciences, assista depuis la tribune officielle au défilé du 1er octobre sur la place Tiananmen et rendit visite à l'acteur Kai Kiao-Tien à Hankow.

La reine Elisabeth rencontre Mao
© A.B.C.
La reine Elisabeth et la princesse Marie-José
devant la Grande Muraille de Chine
© A.B.C.

Aux côtés de Marie-José, la reine essaie un violon au Conservatoire de Shanghai
© A.B.C.

Ce voyage de près d'un mois et demi, qui fit parcourir 3.000 kilomètres à la reine Elisabeth, fut le déclencheur pour la souveraine âgée de 85 ans d'une crise cardiaque. Cette initiative embarrassa fortement la Cour, et en premier lieu son petit-fils le roi Baudouin, autant qu'elle irrita le gouvernement belge. A la fin de sa vie, la reine a visité à plusieurs reprises des régimes communistes, faisant la sourde oreille face aux critiques et désapprobations qui ne manquaient alors pas. La presse n'hésita d'ailleurs pas à lui donner le surnom de "reine rouge". A son retour, Elisabeth indiqua : "par mon voyage en Chinej'espère contribuer au rapprochement entre les peuples et à l'unité du monde". Cette déclaration pacifique ne masque pourtant pas les sympathies à l'égard du communisme de la souveraine qu'elle consignait d'ailleurs dans ses carnets. 



En compagnie d'ouvriers du rail
© A.B.C.
La reine se voit offrir une peinture traditionnelle. Il s'agit aussi d'une
des rares photographies où l'on voit la reine fumer.
© A.B.C.
Au domicile de l'acteur Kai Kiao-Tien à Hankow
© A.B.C.

Pourtant grand voyageur, le fils aîné de la reine Elisabeth, Léopold III, n'a jamais visité la Chine. Il ne s'est rendu qu'à Hong Kong en 1932 lorsqu'il était duc de Brabant et après son abdication en 1961. Le roi Baudouin et la reine Fabiola effectuèrent un voyage d’État en Chine, du 25 mai au 5 juin 1981. A cette époque, le grand maréchal de la Cour, Herman Liebaers, avait eu l'idée d’adjoindre des spécialistes aux visites d’État. Ainsi, étaient du voyage, Mme Engelborghs, experte de l'histoire de la Chine contemporaine, Paul J. Melchior, directeur de l'Observatoire royal de Belgique - présenté par erreur au début de la mission par la presse chinoise comme l'astrologue royal... - , Yves Goldschmidt-Clermont, un savant belge du CERN ainsi que le professeur Van der Keken, théologien. Avant que l'avion n'atterrisse, la délégation fut mise au courant que la cérémonie d'accueil serait réduite. En effet, Song Chingling, sœur du président Chang Kai Chek et possédant le titre de présidente d'honneur du pays, était mourante. Au premier jour de la visite, le roi Baudouin s'entretint avec le vice-président Peng Zhen et avec le Premier ministre Zhao Ziyang. La reine Fabiola, elle, visita un atelier xylographique de Jung Paochai. Un dîner d'Etat fut ensuite servi dans la grande salle du Palais du Peuple au cours duquel le roi et le vice-président prononcèrent un discours. Par la suite, le souverain belge eut un entretien avec le président Deng Xiaping qui délivra un monologue d'une heure... !


Le roi Baudouin avec Deng Xiaoping : les deux hommes sont séparés - tradition
oblige -  par un crachoir, dont la presse se moquait allègrement à l'époque...
© Collection de la reine Fabiola





A Pékin, les souverains se rendirent également à la Grande Muraille de Chine, sur la tombe d'un empereur de la dynastie Ming, au Palais d'été et sur le site de la Cité interdite. Passionné d'astronomie, le roi Baudouin tint à rendre hommage à Fernand Verbiest, un père jésuite belge qui a été l'astronome de l'empereur Kangxi. Dans ce cadre, le couple royal visita l'observatoire de Pékin et la tombe du religieux. Cette dernière était à l'époque normalement inaccessible pour les étrangers car le quartier général d'éducation politique du parti occupait un bâtiment et en avait fait un camp de rééducation où se trouvait d'ailleurs l'ancien Premier ministre Hua Guofeng.

Explication devant la sphère armillaire, instrument construit
par Fernand Verbiest
© Van Parys

La délégation prit ensuite l'avion pour se rendre à Xi'an, destination où la délégation apprit le décès de la présidente d'honneur. Les souverains y visitèrent notamment la tombe de l'empereur Qin. Après cet intermède, un avion emmena le roi Baudouin et la reine Fabiola vers Suzhou. Là, une visite d'une commune avait été programmée, ainsi que ses jardins pour l'après-midi. Le 1er juin, la visite d’État se poursuivit à Shanghai, dont l'acheminement fut réalisé à l'aide du train. Le maire offrit le déjeuner, puis le roi visita l'Observatoire de Shanghai. Quant à la reine, elle se rendit au musée d'art ancien chinois. Le lendemain, les souverains visitèrent un hôpital central avant de reprendre l'avion pour Guilin, où le couple pu apprécier une croisière de six heures sur le fleuve Lijiang. La visite toucha alors à sa fin et il ne restait plus qu'une étape : Canton et son Mémorial Sun Yat Sen.

Croisière sur le Lijiang
© Van Parys


La reine Fabiola à Pékin en 1995,
ici aux côtés de la Première Dame de Malaisie Mme
Dato Seri Datin Paduka
© Mike Fiala
La reine Fabiola, alors veuve, fut de retour en septembre 1995 à Pékin. Elle y représenta la Belgique lors de la quatrième conférence mondiale sur les femmes, organisée sous l'égide des Nations Unies, qui avait pour thèmes la lutte pour l'égalité, le développement et la paix. Cette conférence déboucha sur la Déclaration et le Programme de Beijing. Son beau-frère Albert, prince de Liège, y mena de son côté deux missions économiques en tant que président de l'Office Belge du Commerce Extérieur : la première en 1975 et la seconde en 1993, quelques mois avant de monter sur le trône.

Vu l'intérêt économique de ce pays en pleine expansion, le roi Albert II et la reine Paola effectuèrent en Chine, du 4 au 11 juin 2005, l'un de leurs plus longs voyages d'Etat de leur règne. Il s'agissait d'ailleurs de la première visite de la reine Paola dans ce pays. Ils furent exceptionnellement accompagnés d'une centaine de personnes : le Ministre des Affaires étrangères Karel De Gucht, le président du Comité International Olympique Jacques Rogge, le secrétaire d'Etat aux Affaires européennes Didier Donfut, ainsi que par des hommes d'affaires, les recteurs des universités, etc. Quelques mois auparavant, ce voyage d'Etat avait suscité une polémique auprès des défenseurs des droits de l'homme et de l'indépendance du Tibet car le gouvernement fédéral avait demandé au daïla-lama de reporter sa venue prévue en 2005 en Belgique afin de ne pas heurter les autorités chinoises.


Photo : Xinhua / Lan Hongguang
Au troisième jour de leur séjour, le couple royal fut officiellement reçu sur la célèbre place Tian'anmen par le président Hue Jintao et son épouse. Avant le dîner de gala, les deux chefs d’État assistèrent à la signature de onze accords entre les deux pays : cinq accords gouvernementaux, quatre commerciaux et deux universitaires. Le président donna également son accord à l'organisation du festival Europalia 2009 à Bruxelles. Lors de cet événement, le vice-président chinois fit le déplacement en Belgique afin de procéder avec la famille royale à l'inauguration officielle. Reçu par le roi Albert II, il lui remit en cadeau un album-photo sur la visite en 1961 en Chine de sa grand-mère Elisabeth. La présence de la princesse Maria-Laura, petite-fille du roi Albert II et fille aînée de la princesse Astrid, avait été alors remarquée et s'expliquait par sa passion pour la sinologie. Elle a d'ailleurs étudié deux ans à la School of Oriental and African Studies à Londres et a effectué un stage de perfectionnement de la langue de plusieurs mois en Chine.

Le prince Philippe, de son côté, y a mené cinq missions économiques : en 1996, en 2000, en 2004, en 2007 et en 2011. En comptant sa présence aux Jeux Olympiques de Pékin en 2008, la visite de l'Exposition universelle de Shanghai en 2010, mais aussi un séjour privé de quatre semaines durant l'été 1986, le fils du roi Albert II s'est rendu à huit reprises en Chine avant d'accéder au trône. 


Du 30 mars au 1er avril 2014, le président chinois Xi Jinping et son épouse effectuèrent une visite d'Etat en Belgique, la première pour le nouveau couple royal Philippe et Mathilde. Au programme des visites figuraient Gand et Bruges, mais aussi Brugelette et son parc Pairi Daiza qui venait d'accueillir deux pandas prêtés par la Chine. Une diplomatie du panda qui coïncide avec de bonnes relations bilatérales. Le roi Philippe avait également décerné le Grand Cordon de l'Ordre de Léopold au président chinois. 




Répondant à l'invitation du président Xi Jinping, le roi Philippe et la reine Mathilde ont réservé leur première visite d'Etat à l'étranger à la République populaire de Chine du 20 au 27 juin 2015. Un déplacement qui s'inspire de celui effectué par son père dix ans plus tôt puisque de nombreux chefs d'entreprises et les recteurs d'universités furent conviés. Voulant tenir compte de la réalité institutionnelle du pays, le souverain innova et associa les ministres-présidents des trois régions du pays : Flandre, Wallonie et Bruxelles-Capitale. Les villes de Wuhan, Beijing, Shanghai, Suzhou et Shenzhen furent visités et le programme avait surtout axé sur l'économie (ce sont 90 contrats qui furent signés), même si la reine Mathilde effectua de son côté des visites sociales ou culturelles. Le couple royal prit tout de même le temps de découvrir notamment le spectacle grandiose du Belge Franco Dragone donné à Wuhan et d'arpenter quelques mètres de la Grande Muraille de Chine.